François Hollande, lors de son intervention au 24h du bâtiment de la FFB (crédit : Le Moniteur) |
Ils étaient 4000 personnes le 14 juin dernier, pour assister et participer à la 3ème édition de la grand'messe de la Fédération Française du Bâtiment. 4000 entrepreneurs et cadres du bâtiment, rassemblés au Palais des Sports de Paris pour témoigner des difficultés du secteur et placer le chef de l'Etat, mais aussi Cécile Duflot et Sylvia Pinel, devant leurs responsabilités. 4000 personnes qui ont su, comme personne, faire valoir leurs revendications et mettre sous pression un gouvernement dont la marge de manoeuvre, en une petite heure, s'est considérablement réduite.
Pour la troisième année consécutive, la Fédération Française du Bâtiment organisait les "24h du bâtiment", une manifestation destinée à rassembler ses adhérents autour d'un cycle de conférences traitant des sujets brûlants du secteur et à les mobiliser. Les grands thèmes de débats étaient d'ailleurs parfaitement identifiés : statut des auto-entrepreneurs, concurrence déloyale, lourdeurs administratives, TVA, transition énergétique, bref un contexte idéale pour une opération d'influence de grande envergure. En effet, en stratège expérimenté, la FFB a su parfaitement tirer parti de sa position par rapport au pouvoir, jouant habilement des rapports entre faibles et forts. Habituellement placée du côté des forts, de ceux qui exploitent et qui payent, elle a joué de la crise et de ses justes revendications pour incarner le faible, et mettre un exécutif déjà devant ses responsabilités, celles d'un effondrement total du secteur.
Le grand oral de François Hollande
De fait, dans ce contexte de débat intense et de crise économique, l'événement tenait plus de la réunion d'état-major et du grand oral pour François Hollande, "invité", comme son prédécesseur, à expliquer sa politique en matière de construction, que de la simple visite de courtoisie. Comme l'élève de première qui, profitant de l'ultime semaine pour faire les révisions d'une année, se présente à l'oral du bac de français en sachant pertinement qu'il n'a rien fait, ou trop peu, François Hollande s'est essayé à se montrer proche de son auditoire. A grand renfort de "je sais" (pas moins de onze dans son discours), il a tenu à montrer au monde du BTP qu'il en connaissait tous les enjeux, et en appréciait les acteurs, malgré le "scud" tiré dès le coup d'envoi par Didier Ridoret, le président de la Fédé.
Car les dirigeants de la FFB savent parfaitement s'y prendre pour faire monter la pression, comme en témoigne le sondage IPSOS, publié à propos, qui montrent "l'amour" des Français pour le bâtiment. Et dès les débuts de son discours, François Hollande a reconnu le poids du secteur devant l'économie. Mais se faisant, il a commis une erreur radicale : il a donné un poids considérable à cette épée de Damoclès que serait une destruction du secteur, la menace ultime brandit par la FFB ou encore le CAPEB pour appuyer leurs revendications sur la concurrence déloyale intra-européenne ou les auto-entrepreneurs. Et un par un, il égrené les points de débats, reconnaissant la justesse de l'analyse, sans toutefois apporter de réelles solutions (la TVA), ni de vraies promesses. Dans le contexte du débat contradictoire, le président a donné à la FFB toutes les raisons de combattre.
Certes, la cérémonie finale de cette grand'messe du bâtiment avait pour but de mobiliser des adhérents de la FFB et définir les grands axes de sa politique, mais elle lui a surtout permis de témoigner de sa puissance. Le temps d'un discours, elle a réussi à placer le chef de l'Etat en position de défense face à une audience, non pas tout à fait hostile, car respectueuse, mais attentive et critique, et l'a forcé à se justifier, à tenir compte de cette force. De fait, la marge de manoeuvre du gouvernement s'est considérablement réduite : chaque décision contraire aux désidératas des dirigeants et des adhérents de la Fédé seront ainsi interprétées comme une volonté directe de nuire au secteur. Que retenir donc de cette troisième édition des 24h du bâtiment ? Que la crise est toujours là, que la FFB est puissante et que le gouvernement et le chef de l'Etat sont pieds et poings liés et qu'entre rigueur et croissance, ils n'ont toujours pas tranché. Pas grand'chose en somme.
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