Batimat 2013 (crédit : batimat.com)
Du 4 au 9
novembre 2013 se tient la 29ème édition du salon Batimat. Principale
référence mondiale des salons de la construction, il rassemble tous les deux
ans les professionnels (maîtres d’œuvre, maîtres d’ouvrage, entrepreneurs et
distributeurs), français et étrangers, venus présenter leurs derniers produits,
matériels innovants et services. Mais loin du dynamisme habituel, cet événement
incontournable est gagné, à l'image du pays, par la langueur et la crise. Et sa
délocalisation à Villepinte n'arrange pas les choses...
Ces
dernières années, les enjeux énergétiques que connaît la société, et
donc le secteur du bâtiment, ont servi de leitmotiv à Batimat, permettant ainsi
aux acteurs d’échanger, de faire émerger des solutions techniques pertinentes
afin de répondre aux différentes normes et lois relatives aux constructions et
rénovations durables (RT 2012 pour ne parler que d’elle). L’édition
2013 ne déroge pas à la règle avec quatre thèmes centraux : la performance
énergétique, la basse consommation, l’accessibilité et le confort d’usage des
bâtiments ainsi que la forte dimension technologique de la construction.
L’organisateur, Reed Expositions France, filiale du numéro un
mondial des salons, le Britannique Reed Exhibitions, table sur 3 500 exposants
et 400 000 visiteurs. Plus que jamais, l'institution Batimat participe
pleinement à la vie du secteur et demeure un rendez-vous biennal
incontournable. Pourtant, cette optimisme laisse songeur. En effet, de plus
grand événement mondial, dans les années 1980, avec plusieurs dizaines de pays
représentés, Batimat semble végéter voire dépérir. Et la crise n’est pas la
seule explication.
Les dernières éditions en demi-teinte, 2013 sur la
même pente ?
En effet,
l’édition 2009 a connu une baisse de 15 % de la fréquentation par rapport à
celle de 2007, conjuguée à une baisse de 15 % du nombre d’exposants (2400
exposants présents à Batimat en 2009). A l'époque, la crise était l'excuse
toute trouvée, et cela était d’autant plus compréhensible que l’édition 2007
s’était déroulée alors que le secteur tournait à plein régime. La chute de
fréquentation de 2009 n’en avait été que plus rude.
Devant ce
constat, et pour booster l’édition 2011, les organisateurs ont programmé divers
évènements afin de répondre à l’attente des visiteurs. Ainsi, ils attendaient 380 000 visiteurs, pour environ 2 280
exposants. In fine, malgré une forte
progression des visiteurs clés (décisionnaires prescripteurs et les
entrepreneurs/artisans), la fréquentation globale a été en baisse de 7,5 % par rapport à 2009, soit 350 000 personnes. Le nombre de fabricants a même
chuté de 30 % !
Bilan
Batimat 2011
Source :
Le Moniteur.
Pour
l’édition 2013, la conjoncture n'est pas meilleure et il se dit que certains
grands noms du secteur seront absents, préférant se concentrer sur d’autres
évènements ou se focaliser sur d’autres moyens/vecteurs pour présenter leurs
produits aux maîtres d’œuvre, artisans, etc. Le marketing se joue désormais en
coulisse et sur Internet. Dès lors, il n’est pas surprenant d’apprendre que les
prix des stands connaissent, ces derniers temps, une grosse décote pour remplir
le salon… au détriment des premiers arrivés qui ont payés plein tarif et
peuvent se sentir lésés. Mais au-delà de cette tendance baissière des dernières
éditions, deux changements majeurs apparaissent pour 2013 : le lieu et un
nouveau concept.
Le déménagement et le nouveau
concept de Batimat suscitent la défiance.
Pour
l’édition 2013, le parc des expositions de Paris-Nord Villepinte se substitue à
l’historique Paris Expo Porte de Versailles, bien connu des habitués. Pour les
professionnels du bâtiment, la pilule a du mal à passer mais la responsabilité
de Reed Expositions n'est pas engagée : en effet, c'est le réaménagement du
site qui est à l'origine de la délocalisation. Le projet n'en est qu'à ses
débuts, mais le Hall 1 doit être démoli afin d’y construire la si décriée
Tour Triangle. Les critiques, s'il y en a, peuvent se tourner vers
le maître d’ouvrage Unibail-Rodamco.
Qui plus
est, Villepinte, le nouveau lieu, où se déroulent les plus grands salons
professionnels internationaux organisés en France, semble avoir de nombreux
atouts : modernisation ces dernières années, confort de visite, bonne
connexion entre les halls, etc. S’il ne devait avoir qu’un seul défaut, ce
serait celui-ci : son éloignement de Paris. Quand on sait que 80 % des
visiteurs de Batimat sont français, dont les deux-tiers de province, mixant
venue au salon et visite/flânerie dans la capitale, on peut se demander si cela
ne va pas les rebuter. Que fait-on à Villepinte de 18h à 9h ? On passera
également sur les transports pour s’y rendre, et le fameux RER B, en grève ce vendredi 11 octobre.
Toutefois,
ce n'est pas le plus gênant. Non, le vrai problème, c'est le nouveau concept de
Batimat servi par l'organisateur. En effet, l’édition 2013 s’additionne de deux
salons : d’une part, Interclima+Elec, dédié aux solutions pour l’efficacité
énergétique et le confort, ce qui permet de crédibiliser le thème des enjeux
énergétiques du bâtiment. D’autre part, Idéo Bain, qui est le salon des
nouvelles salles de bains.
On en reste
bouche bée. Reed Expositions a-t-il voulu réduire les coûts et faire trois
salons en un, au risque d’une perte de repères pour les visiteurs ? Cela
n’ouvre-t-il pas la voie à de futures éditions Batimat très édulcorées, moins
centrées sur les professionnels du secteur, mais dont l’objectif serait
d’attirer un public plus large – non professionnel – et qui donnerait plus de
visibilité… et de rentabilité ? Sans parler du lieu des prochaines
éditions, Villepinte semblant acquis pour 2015 et 2017 (et la fin programmée
des travaux de la Tour Triangle). L’avenir nous le dira…
Batimat 2013, l’occasion rêvée –
mais gâchée – des professionnels du BTP pour se faire entendre.
Batimat 2013
aurait pu être synonyme de coups médiatiques et politiques, rassemblant les acteurs
de la profession sur un lieu unique et donnant du poids aux revendications. Une
manifestation d’envergure des artisans mais aussi des membres de la FFB aurait
été symbolique. Mais qui y croient aujourd’hui ? La grande journée de
manifestation de la CAPEB, en septembre, a connu un bilan mitigée, notamment du fait d’une multitude
de sites d’action. La CAPEB en a-t-elle pris conscience ? Rien n’est moins
sûr…
Or, le
paradoxe est le suivant : historiquement gros pourvoyeur d’emplois, le
bâtiment a du mal à se faire entendre. Plus grave, son salon phare, Batimat,
voit peu de personnalités politiques (ministres, secrétaires d’Etat, députés, etc.)
alors que le salon de l’agriculture est le défilé annuel de l’ensemble du monde
politique, dont le Président de la République. Pourtant, les sujets
de dialogue – de discordes – ne manquent pas : l’ALUR, la pénibilité au
travail ou encore la TVA. Mais qui parirait sur la venue de Cécile Duflot
(Ministre du Logement), de Michel Sapin (Ministre du travail) ou de Pierre
Moscovici (Ministère de l’Economie) ?
Le Batimat
version 2013 ne reflète pas seulement la défiance des professionnels vis-à-vis
de l’organisateur mais pose également la question de l’efficacité des grandes
fédérations professionnelles à se faire entendre sans tomber dans la
caricature. Il est le reflet d'un secteur en souffrance qui peine à trouver un
second souffle.
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sur Twitter : @Bati2030
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