La soleil brillera-t-il à nouveau sur le secteur du photovoltaïque grâce à l'autoconsommation ? (crédit : TPE énergie photovoltaïque) |
Placées sous les signes de l'environnement et de la collaboration entre corps de métiers, les dernières journées de la CAPEB ont notamment consacré une de leurs tables rondes à ce qui représente le dernier espoir pour sortir l'industrie photovoltaïque française de l'ornière : l'autoconsommation. En effet, à la fois tué par la concurrence chinoise, l'écodélinquance et la fin des subventions au secteur, le photovoltaïque s'est enfoncé dans une crise profonde, encore accentuée par un contexte économique défavorable. Mais la crise a peut-être eu du bon en débarrassant le milieu des incompétents et des profiteurs (voire escrocs), en le délivrant de sa dépendance aux subventions, pour en revenir à ce concept simple et marqué du sceau du bon sens qu'est l'autoconsommation. Alors, espoir réel ou nouvelle insolation ?
L'autoconsommation n'est pas à proprement parlé un concept nouveau. On pourrait même dire que l'existence d'équipements "individuels" de production d'énergie, renouvelables (éoliennes, photovoltaïques) ou non (groupe électrogène), devrait permettre naturellement de produire et consommer sa propre électricité, comme cela se fait par exemple depuis des dizaines d'années aux Etats-Unis (pour des raisons d'isolement). Mais la structure jacobine de la France, avec ce dogme ancien d'une électricité au tarif national unique, a largement empêché son développement. Ce n'est qu'après la crise du photovoltaïque en 2010 que l'ex-ministre du Développement Durable, Delphine Batho, a évoqué la promotion de l'autoconsommation sur les recommandations du groupe de travail "mix énergétique".
Pour relancer le photovoltaïque et concurrencer (un peu) le nucléaire
Selon le groupe "mix énergétique", l'autoconsommation est une solution incontournable pour les objectifs de réduction de la part du nucléaire dans la production d'électricité nationale. Or les nombreuses limitations spécifiquement françaises (intégration au bâti, raccordement au réseau EDF) ne facilitent pas l'installation de ces équipements. Le Syndicat des Energies Renouvelables (SER) en a aujourd'hui fait son cheval de bataille. Selon lui, 20 à 40 % de l'électricité d'une maison individuelle pourrait être autoconsommée !
L'intérêt de l'autoconsommation est multiple. Dans un premier temps, elle permet de coordonner de manière très fine la production et la consommation d'électricité en local. Plus besoin de raccordement avec le réseau EDF, qui est toujours difficile à mettre en place dans les cas d'habitations isolées. A l'échelle d'un quartier, ou mieux, d'un bâtiment, comme une grande surface commerciale, la production d'électricité pourrait être ainsi ajustée au mieux, ne nécessitant aucune évacuation vers l'extérieur. De fait, une production in situ ne nécessiterait par de mettre en place de nouveaux réseaux, d'où un gain économique important, notamment dans les endroits isolés (exploitations agricoles, stations de skis, îles, etc.).
De plus, l'effet psychologique n'est pas non plus à négliger. Dans le cadre de l'autarcie visée par un certain nombre de particuliers s'équipant en panneaux solaires, une réelle autoconsommation, donc une maîtrise totale de l'énergie produite et consommée, donne plus que jamais du sens à la démarche. A l'exposé des arguments, d'une telle évidence, on voit mal ce qui explique le retard accumulé par rapport à un pays comme l'Allemagne.
Une "auto" bien freinée
La réponse est à trouver dans la rentabilité de l'autoconsommation en France (et pas ailleurs). En effet, le prix de rachat de l'électricité par EDF justifie encore aujourd'hui qu'il vaut mieux vendre l'électricité produite que la consommer soi-même. C'est d'ailleurs ce contresens majeur qui est à l'origine de l'idée que l'autoconsommation est interdite en France ! En réalité, du point de vue financier, il n'y a tout simplement pas d'intérêt à l'autoconsommation par rapport à une installation habituelle. Autre problème majeur, si la production elle-même ne demande pas vraiment d'investissements plus importants qu'une installation lambda, il n'existe pas aujourd'hui de solutions de stockage bon marché. Face à un besoin énergétique ponctuel, il faut donc se doter d'équipements alternatifs (éolienne, pompe à chaleur, chaudière à bois, etc.), ce qui allourdit encore la facture de l'autarcie.
A cette barrière "intéressement" s'ajoute une barrière juridique. En France, il faut se constituer en une société productrice d'énergie pour pouvoir vendre son électricité en dehors d'un contrat EDF (directement à ses voisins par exemple), ce qui suppose de nombreuses démarches administratives, de normalisation et de taxation. Il s'agit là d'une limite importante à l'établissement d'une centrale d'autoconsommation dans certains hameaux ou quartiers. D'autre part, l'obligation d'intégration au bâti limite forcément la surface, et donc la quantité d'électricité nécessaire au fonctionnement d'un bâti (sans compter les problème d'étanchéité, etc.).
Enfin, l'autoconsommation n'est pas un modèle idéal pour les maisons individuelles, dont il ne peut contribuer qu'à 40 % de l'électricité consommée, selon le SER. En revanche, un hangar, une grande surface commerciale ou une usine possédant une surface suffisante pour y déployer des panneaux photovoltaïques pourraient être complètement autonomes de ce point de vue. A l'échelle d'un quartier, cela devrait être également possible si certaines barrières évoquées plus haut venaient à disparaître.
Autoconsommer mieux et plus
La prise de conscience récente (malgré la démission de Delphine Batho) du gouvernement et des acteurs de la filière de l'intérêt de l'autoconsommation est déjà une bien belle avancée. Les barrières qui en limitent le développement étant parfaitement identifiées, des mesures simples permettront d'y remédier facilement, comme la création d'un statut de "petit producteur" d'électricité, l'ajustement des tarifs de rachat de l'électricité, ou encore la mise en place d'une cotisation destinée à soutenir l'entretien des réseaux électriques. Et surtout, elles permettraient à la filière photovoltaïque de revenir sur le devant de la scène, débarrassée de ce handicap majeur qu'était la dépendance aux subventions étatiques, pour un développement plus sain et durable, porté sur l'autonomie et l'innovation. Le message est simple : si l'autoconsommation pure est un fantasme, c'est l'amélioration constante du taux d'autoconsommation qui doit devenir un objectif. Espérons que les récentes consultations menées par le ministère sur cette question, bien plus complexes qu'il n'y paraît, aboutissent à des solutions satisfaisantes pour tous les acteurs de ce secteur... qui en ont bien besoin !
Nous suivre sur Twitter : @Bati2030
Nous suivre sur Twitter : @Bati2030
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
N'hésitez pas à poster vos commentaires et avis !